mardi 16 octobre 2012

L'interdisciplinarité en milieu bilingue : formation avec Jean Duverger

                  Cette semaine nous avons eu le plaisir d'acceuillir Mr Jean Duverger pour un seminaire de formation sur le bilinguisme auprès des professeurs costariciens. Sa venue fait suite à un appel à projet mené par l'ambassade de France et fut très riche tant par les apports théoriques que par la mise en pratique et la dynamique créée aupres des équipes enseignantes.


Discours d’accueil de Mr l'ambassadeur
                
            Jean Duverger est l'un des précurseurs en terme de recherches sur l'enseignement bilingue,  il a ainsi écrit plusieurs ouvrages, tant sur l'apprentissage de la lecture en milieu bilingue que sur l''utilisation de ces différentes langues à travers les disciplines dites non linguistiques (sciences, mathématiques, histoire géographie). Il a occupé les fonctions d'inspecteur de l'éducation national, de formateur d'inspecteur,  fut le premier inspecteur national à être nommé pour la zone Espagne-Portugal et il est president-fondateur de l'Adeb (Association pour le développement de l'enseignement bilingue).

             Durant cette formation, avec Maud le Chartier et Jean Duverger, nous avons donc abordé diverses thématiques, parmi elles : 
                                        - la place de chacune et la cohabitation des langues (langue maternelle et langue d’apprentissage) dans les différentes situations pédagogiques et didactiques ( gestion de classe, formulation de consignes, situation de recherche, synthèses...)
                                        -  la place de la traduction et le traitement de l'erreur en classe bilingue
                                        -  la discipline dans le système costaricien
                                        -  les pédagogies actives et la pédagogie de projet interdisciplinaire adaptées à l’enseignement bilingue.
 Si cette semaine aura permis aux équipes du primaire et du secondaire de réfléchir de manière active sur ces sujets, elle aura aussi été une opportunité pour se réunir, faire un bilan, et se fixer des nouveaux objectifs à atteindre.


Travaux d'ateliers sur la gestion de projet bilingue
              
             A l'origine professeur de Sciences naturelles, Jean Duverger insiste sur le fait qu'il s'est intéressé au bilinguisme par hasard, de par son poste en Espagne et les problématiques rencontrées sur place. Pour lui le fait de ne pas être issu d'une formation de linguiste ou spécialiste des langues l'a aidé pour aborder ces thématiques de manière neutre et nouvelle, ce à travers des cas concrets, et basée une pédagogie où l'élève participe lui même à l’élaboration de ses connaissances.

              Jean Duverger réfute ainsi l'idée que l'immersion totale de l'élève dans une langue qui n'est pas sa langue maternelle est bénéfique à l'apprentissage d'une nouvelle. Selon lui, on ne peut apprendre une langue qu'a partir de la première (la langue maternelle), les langues doivent se renforcer l'une l'autre, être en communication, à travers des modalités définies par l'enseignant, pour que l’élève fasse lui même des ponts et transferts de l'une à l'autre.

              Lorsqu'on parle de bilinguisme, c'est donc mettre en relation deux systèmes langagiers pour qu'ils se renforcent réciproquement, " il ne s'agit donc surtout pas de faire deux apprentissages monolingues." et de répéter les enseignements en deux langues différentes... "on apprend à lire qu'une fois et on apprend toujours en fonction de ce que l'on sait déjà" !
            Cette idée d'immersion totale, où l'élève serait amener à rejeter et oublier le temps d'une classe sa langue maternelle,  (encore très répandue et appliquée, dont au Costa Rica) est pour lui susceptible de bloquer l’élève dans ses possibilités de communication et serait davantage source de dégout pour la langue plutôt que d'attrait.

             Ainsi toutes les langues (proches étymologiquement ou non) sont d'abord vues comme des moyens, des codes differents qui permettent d'aborder une seule et même fonction : le langage.
On parle ainsi d’éducation linguistique au sens large, comme on peut peut parler d’éducation physique ou d’éducation musicale. On apprend mieux la musique grâce à differents styles musicaux, tout comme on apprend mieux le langage à travers des codes, des langues différentes.
 


Analyse de productions

             Pour Mr Duverger, l'enseignant doit donc piloter ces interférences entre langues d'apprentissage pour développer les compétences langagières de l’élève  Pour cela, une pédagogie de projet interdisciplinaire menée en classe est le moyen le plus efficace. A travers une production collective, l’élève est à amené à résoudre des problèmes et adopter une attitude réflexive (on parle de conscience métalinguistique) pour utiliser la langue de manière concrète et à bon escient.


            Cette semaine de formation s'est achevée par une intervention des inspectrices du Mep pour le francais : Marielos et Olga. Les reflexions menées auront permis de faire émerger les futures problématiques de recherche :  la communication et la coopération entre professeurs enseignants une langue différente, l'apprentissage de la lecture en milieu bi/plurilingue,  une étude comparée des programmes costariciens et français, la mise en place de projets bilingue relatifs au développement durable et l'élaboration de règles de vie communes aux sections bilingues costariciennes.

           Un grand remerciement aux professeurs du projet et aux inspectrices du Mep pour leur participation; à Maud Le Chartier avec qui ce fut un plaisir d'organiser et de mener cette formation et bien sur à Mr Duverger pour sa grande disponibilité, ses conseils et sa simplicité.


 
Avec Jean Duverger et Maud le Chartier


samedi 6 octobre 2012

Fiesta nacional y actos civicos


 


               Le mois de septembre s'achève, et avec lui un mois de fête au Costa Rica. Le 15 du mois se célébrait en effet l’indépendance du pays et au passage celle de tous les pays d'Amérique centrale (Guatemala, Honduras, Salvador, Nicaragua, Costa Rica ) proclamée en 1821.
              La nuit même de cette proclamation les habitants du Guatemala sortaient et attendaient l'annonce dans la rue une lanterne à la main... Ces lanternes (los faroles) sont ainsi devenus le symbole de l’indépendance du Costa Rica.


 















  
Faroles
   
            Cependant, à la différence de ses voisins, ce ne sont pas les chars blindés et les régimes d'infanterie qui défilent le jour de la fête nationale mais les enfants (le Costa Rica n'a plus d’exécutif depuis 1948).
 Le 14 septembre au soir, défilent ainsi  en fanfare les élèves des écoles, ceux de maternelle défilent quant à eux le matin en habit traditionnel et lanterne à la main.
Lors de ces défilés on y trouve des costumes et lanternes en tout genre, de la plus simple à l’œuvre d'art, d'une représentation de flambeau à celle représentant un village entier (cf défilé à Cartago et photos des lanternes réalisées par les élèves).


Desfile de los préscolares de la escuela Republica francesa, Catargo centro.
 

 





 

               Les semaines qui précédent la fête nationale sont  ainsi très chargées, tant pour les élèves que les enseignants. Dans les écoles, les répétitions de la fanfare ou la fabrication de décorations aux couleurs nationales sont  quotidiennes. De plus, les élèves (de la maternelle au lycée) doivent effectuer des actes civiques en honneur à la patrie.
              Dans le primaire et le préscolaire cela se traduit par la préparation d’expositions, d'affichages, de discours ou de pièces de théâtre sur des éléments représentatifs et symboliques du Costa Rica : la faune et flore locale, plats traditionnels costariciens, coutumes et valeurs nationales, historique du drapeau,  légendes costariciennes etc..

Discours sur les emblèmes costariciens, Concepcion.




Repétitions de la fanfare d'ecole, Cartago


               Pour positiver ces productions, tous les élèves de l’école se réunissent chaque jour, cela se fait de manière très ritualisée et cérémonielle : présentation et hymne au drapeau, hymne national, présentation des élèves, sortie du drapeau... (cf photos d'un acte civique à la Terràn Valls).


Acto civico, escuela Terràn Valls, Concepcion de Tres Rios.


















            Pour quelqu'un d’extérieur cela peut sembler dérangeant ou exagéré tant le sentiment national semble exacerbé.. A quoi pense l'élève de 5 ans quand il doit chanter l'hymne la main droite sur le cœur alors qu'il ne différencie pas sa droite de sa gauche ?

           Cependant, si en France l’excès d'usage de symboles nationaux peut être perçu comme "extrémiste", le sens conféré ici est tout à fait différent... la majorité des costariciens sont simplement fiers d'appartenir à ce pays,  ils considèrent les éléments formant la culture nationale comme étant de leur propre identité , et c'est à ce sentiment d’appartenance commun que participe l’école publique et qu’intègre le jeune élève. L’école est ainsi vue comme un lieu de socialisation et de transmission de valeurs dont celles de la nation ont la priorité. (trabajo, paz, convivencia, independencia...)
           Rien de plus normal donc ici que d'arborer sur sa voiture, son bureau, ou devant sa maison la bannière tricolore. (le drapeau costaricien s'est inspiré de celui français avec cependant une signification différente pour les couleurs : bleu symbole du ciel et de l’éternité, blanc pour paix, et rouge pour le travail et le labeur).